choisir vin rouge pour cuisiner

Choisir le bon vin rouge en cuisine

Dimanche dernier, je préparais un bœuf bourguignon. J’avais tout : la viande, les carottes, les oignons, les lardons. Mais devant ma cave (bon, mon placard à bouteilles), j’ai eu un doute. Ce Bordeaux à 15 € que j’aime bien boire, je le mets dans la cocotte ? Ou je prends la bouteille à 4 € du supermarché ? Une fois cuit pendant trois heures, on sent vraiment la différence ?

Choisir le bon vin rouge pour cuisiner, c’est moins évident qu’il n’y paraît. Il y a des règles à connaître en gastronomie, des pièges à éviter, et surtout, pas besoin de ruiner son budget pour obtenir un bon résultat. Si cela vous intéresse j’ai aussi fais un article similaire avec le vin blanc.

Les règles de base du vin rouge en cuisine

Avant de parler de cépages et d’appellations, posons les fondamentaux.

Ne cuisinez jamais avec un vin imbuvable

C’est la règle numéro un. Si le vin est tourné, piqué, ou tellement mauvais que vous ne pourriez pas en boire un verre, ne le mettez pas dans votre plat. La cuisson ne masque pas les défauts, elle les concentre.

Par contre, pas besoin d’un grand cru. Un vin rouge pour cuisiner correct, que vous boiriez sans déplaisir, suffit amplement.

L’alcool s’évapore, pas les arômes

Contrairement à ce qu’on entend souvent, l’alcool ne s’évapore pas complètement à la cuisson, mais en grande partie. Ce qui reste, ce sont les arômes du vin : les tanins, l’acidité, les notes fruitées ou boisées.

C’est pour ça qu’un vin trop tannique ou trop boisé peut donner de l’amertume à votre plat.

Adaptez le vin au plat

Un vin rouge cuisine pour un coq au vin ne sera pas forcément le même que pour une sauce bolognaise. L’intensité du plat doit correspondre à l’intensité du vin.

Les caractéristiques d’un bon vin pour cuisiner

Qu’est-ce qui fait qu’un vin fonctionne bien en cuisine ?

L’acidité modérée est essentielle. Un vin trop acide donnera une sauce aigre, tandis qu’un vin avec une acidité équilibrée apporte de la fraîcheur sans agresser le palais.

Les tanins souples sont préférables aux tanins trop présents qu’on trouve dans certains Bordeaux jeunes. Ces derniers deviennent amers à la cuisson et peuvent gâcher votre plat.

Le fruité compte énormément. Les vins avec de bons arômes fruités (fruits rouges, fruits noirs) enrichissent le goût du plat. Évitez les vins trop plats ou neutres qui n’apportent rien.

Attention aussi au bois. Un vin élevé en fût de chêne neuf apporte des notes vanillées et toastées qui peuvent devenir écœurantes en cuisson. Sauf si c’est spécifiquement ce que vous cherchez, privilégiez des vins peu ou pas boisés.

Les meilleurs vins rouges par type de plat

Voilà le tableau qui résume les associations classiques :

Type de platVin recommandéPourquoi
Bœuf bourguignonBourgogne rouge (Pinot Noir)Tradition et équilibre parfait
Coq au vinBourgogne ou Côtes du RhôneFruité et structure modérée
Daube provençaleCôtes du Rhône ou LanguedocPuissance pour plat mijoté long
Risotto au vin rougeVin italien léger (Barbera)Fruité sans trop de tanins
Sauce bolognaiseChianti ou vin du SudAcidité qui équilibre la tomate
Civet de sanglierCahors ou MadiranPuissance pour viande forte
Poire au vin rougeBeaujolaisArômes fruités qui subliment

Pour les viandes rouges mijotées

Les plats mijotés comme le bœuf bourguignon, la daube, ou le civet demandent des vins avec du corps mais pas trop de tanins agressifs.

Le Côtes du Rhône offre un excellent rapport qualité-prix pour ces préparations. Les Corbières ou Fitou sont puissants et aromatiques, parfaits pour les longues cuissons. Un Bourgogne rouge entrée de gamme respecte la tradition sans exploser le budget. Les Côtes du Roussillon apportent un fruité généreux.

Pour un bœuf bourguignon, techniquement vous devriez utiliser un Bourgogne rouge. Mais un Bourgogne correct coûte minimum 15-20 €. Un Côtes du Rhône à 7-8 € donnera un excellent résultat pour trois fois moins cher.

Pour les sauces et réductions

Les sauces au vin rouge (sauce bordelaise, sauce marchand de vin) nécessitent un vin avec de la structure qui supporte la réduction.

Le Bordeaux générique est structuré sans être trop cher. Le Minervois offre un bon équilibre. Le Bergerac rouge constitue une alternative abordable au Bordeaux, avec des caractéristiques similaires pour moitié prix.

Évitez les vins trop légers qui disparaissent complètement lors de la réduction. Vous vous retrouveriez avec une sauce fade qui manque de corps.

Pour les plats à la tomate

Les sauces tomate, ragùs, bolognaises s’accommodent bien de vins avec une bonne acidité qui équilibre celle de la tomate.

Le Chianti est le classique italien pour la bolognaise, et il y a une raison. Son acidité naturelle s’harmonise parfaitement avec les tomates. Le Montepulciano d’Abruzzo est fruité et pas cher. Un Languedoc rouge jeune constitue un bon compromis français.

Un vin trop tannique avec la tomate peut créer une amertume désagréable. C’est l’erreur classique qu’on fait tous une fois avant d’apprendre.

Pour les desserts au vin rouge

Oui, on peut cuisiner des desserts au vin rouge (poires au vin, fruits pochés). Utilisez un Beaujolais pour son fruité et sa légèreté. Un Côtes du Rhône jeune apporte de beaux arômes de fruits rouges. Le Pinot Noir d’Alsace est délicat et aromatique, parfait pour des desserts raffinés.

Évitez absolument les vins trop tanniques ou boisés qui donneraient un goût bizarre, presque médicinal, au dessert.

Les cépages qui fonctionnent bien en cuisine

Si on raisonne par cépage plutôt que par appellation, voilà ce qui marche.

Le Pinot Noir

Léger, fruité, peu tannique. Parfait pour le bœuf bourguignon, le coq au vin, les sauces délicates. C’est le cépage de Bourgogne. Son équilibre naturel en fait un des cépages les plus polyvalents en cuisine.

Bourgogne Pinot Noir

La Syrah

Corsée, épicée, avec du caractère. Excellente pour les viandes fortes (gibier, agneau) et les plats mijotés puissants. On la trouve dans les Côtes du Rhône, Crozes-Hermitage. Ses notes poivrées se marient particulièrement bien avec les épices.

Côtes-du-Rhône

Le Grenache

Fruité, généreux, souple. Très polyvalent en cuisine. C’est la base des Côtes du Rhône et des vins du Sud. Son côté rond et chaleureux fonctionne avec presque tout.

Le Merlot

Rond, souple, fruité. Fonctionne bien dans les sauces, les ragoûts. Dominant dans beaucoup de Bordeaux et vins du Sud-Ouest. Son côté velouté apporte de l’onctuosité aux sauces.

Merlot

Le Sangiovese

Le cépage italien du Chianti. Acidité marquée, parfait avec les tomates. Si vous cuisinez italien, c’est votre meilleur allié.

Les vins à éviter en cuisine

Certains vins posent problème en cuisson, et autant le savoir avant de gâcher un plat.

Les vins trop boisés

Un vin qui a passé 18 mois en fût de chêne neuf donne des notes de vanille et de toast concentrées qui peuvent dominer le plat. Sauf si vous cherchez spécifiquement cet effet (ce qui est rare), évitez ces vins. La plupart des grands Bordeaux, Rioja Gran Reserva, et autres vins de garde rentrent dans cette catégorie.

Les vins trop tanniques

Les jeunes Cahors, Madiran, ou Bordeaux très structurés ont des tanins qui, en cuisant, deviennent astringents et amers. Si vous les utilisez absolument, il faut des cuissons très longues (3-4 heures minimum) pour les adoucir. Sinon, votre plat aura un arrière-goût désagréable.

Les vins « de cuisine » industriels

Ces bouteilles marquées « vin de cuisine » dans les supermarchés sont souvent de très mauvaise qualité, parfois avec des additifs. Ils donnent un goût artificiel aux plats. Franchement, mieux vaut un vin de table basique mais honnête.

Les vins trop vieux

Un vieux Bordeaux qui a développé des arômes tertiaires complexes (cuir, sous-bois, champignon) va perdre toute sa finesse à la cuisson. C’est du gâchis pur et simple. Gardez ces bouteilles pour les boire.

Le rapport qualité-prix optimal

Soyons pragmatiques. Quel est le budget raisonnable pour un vin pour cuisiner ?

La fourchette 5-10 €

Entre 5 € et 10 € la bouteille, vous trouvez d’excellents vins pour la cuisine. Un Côtes du Rhône Villages offre une belle structure aromatique. Les Languedoc ou Corbières apportent de la puissance. Un Bordeaux générique reste une valeur sûre. Les Chianti italiens offrent un excellent rapport qualité-prix. Les Côtes du Roussillon sont généreux et fruités.

En dessous de 5 €

Vous êtes sur des vins très basiques. Ça peut dépanner mais la qualité sera juste correcte. Ne descendez pas en dessous de 3-4 €, là vous entrez dans le vin vraiment industriel qui peut carrément gâcher votre plat.

Au-dessus de 10 €

Vous payez pour de la qualité que la cuisson va en partie détruire. Ça reste valable si vous êtes exigeant, mais le rapport qualité-prix devient moins bon. L’alcool et une partie des arômes vont s’évaporer, vous ne profiterez pas pleinement de ce que vous avez payé.

Mon conseil personnel : achetez des bouteilles entre 6 et 8 € en promotion. Vous aurez un bon vin à cuisiner pour 5-6 € finalement. C’est le sweet spot parfait.

Les formats pratiques pour cuisiner

Une bouteille standard fait 75 cl. Si votre recette demande 50 cl de vin, il vous reste 25 cl.

Conservation du vin ouvert

Vous pouvez le boire (évidemment), le conserver au frigo (3-4 jours avec le bouchon), ou le congeler dans un bac à glaçons pour usage ultérieur. Les cubes de vin congelés sont super pratiques pour ajouter un fond de vin à une sauce sans ouvrir une bouteille entière.

Les alternatives à la bouteille classique

Les demi-bouteilles (37,5 cl) sont pratiques pour la cuisine. Moins de gâchis si vous n’utilisez pas tout. Certains supermarchés vendent du vin en brique ou en bag-in-box. La qualité est variable, mais certains sont corrects pour cuisiner. L’avantage du cubi, c’est qu’il se conserve plusieurs semaines après ouverture.

Les erreurs fréquentes à éviter

Parce que j’en ai fait, des conneries en cuisinant au vin.

Confondre vin et vinaigre

Utiliser du vinaigre de vin à la place du vin : non, vraiment, non. Le vinaigre est acide et aigre, rien à voir avec le vin. Ça va gâcher votre plat irrémédiablement. Cette erreur arrive plus souvent qu’on ne le croit, surtout quand on range ses bouteilles n’importe comment.

Doser incorrectement

Mettre trop de vin donne un goût alcoolisé et acide désagréable. Si la recette dit 25 cl, ne mettez pas 50 cl « pour plus de goût ». Vous allez juste noyer les autres saveurs et créer un déséquilibre.

Négliger la réduction

Ne pas faire réduire suffisamment : la réduction concentre les arômes et évapore une partie de l’alcool. Si vous ne réduisez pas assez, votre sauce sera trop liquide et trop alcoolisée. Quand une recette dit « réduire de moitié », c’est pas pour rien.

Mal chronométrer l’ajout

Ajouter le vin à la fin de cuisson : le vin doit cuire pour que l’alcool s’évapore et que les arômes s’intègrent. Ajoutez-le au début ou en milieu de cuisson, jamais à la toute fin. Sinon vous aurez un goût d’alcool cru désagréable.

Utiliser du vin oxydé

Si votre bouteille est ouverte depuis deux semaines et que le vin sent le vinaigre, jetez. L’oxydation donne des goûts désagréables qui ne partent pas à la cuisson, au contraire.

Les alternatives au vin rouge

Si vous n’avez pas de vin rouge sous la main ou que vous ne buvez pas d’alcool, il existe des options.

Le bouillon de bœuf

Pour remplacer le vin dans un bœuf bourguignon ou une daube, utilisez du bouillon de bœuf maison ou de qualité. Ajoutez une cuillère à café de vinaigre balsamique pour imiter l’acidité du vin. Ça n’aura pas la même profondeur aromatique, mais ça reste savoureux.

Le jus de raisin

Du jus de raisin rouge non sucré mélangé avec un peu de vinaigre de vin rouge peut remplacer le vin dans certaines recettes. Évidemment, l’alcool n’est pas là, mais vous conservez une partie des arômes fruités.

Le vin désalcoolisé

Il existe du vin rouge sans alcool en supermarché. La qualité est moyenne mais ça dépanne pour cuisiner si vous évitez l’alcool pour des raisons religieuses ou de santé.

La bière brune

Une bière brune peut remplacer le vin rouge dans certains plats mijotés (carbonnade flamande, ragoûts). Ça donne un goût différent, plus malté, mais c’est très bon. C’est même traditionnel dans certaines régions.

Quelques recettes classiques détaillées

Pour illustrer concrètement les choix de vin.

Bœuf bourguignon

Traditionnellement, on utilise un Bourgogne rouge. Mais un bon Côtes du Rhône fait un excellent bourguignon pour moitié prix. Comptez 75 cl de vin pour 1,5 kg de viande. Le vin doit couvrir la viande dans la cocotte. Cuisson longue (2h30 à 3h) à feu doux.

Mon choix : Côtes du Rhône Villages à 7-8 €.

Coq au vin

Même principe que le bourguignon. 50 cl de vin pour un coq de 1,5 kg. Cuisson 1h30 à 2h. Le vin apporte l’essentiel du liquide de cuisson, donc sa qualité se sent vraiment dans le résultat final.

Mon choix : Pinot Noir d’Alsace ou Beaujolais Villages.

Daube provençale

Un plat du Sud qui demande un vin du Sud : Côtes du Rhône, Côtes de Provence, Languedoc. 75 cl de vin pour 1,5 kg de viande. Cuisson très longue (3 à 4 heures) qui permet aux tanins de s’adoucir complètement.

Mon choix : Corbières ou Fitou (puissants et pas chers).

Risotto au vin rouge

Un risotto italien demande un vin italien : Valpolicella, Barbera, Dolcetto. 25 cl de vin pour 300 g de riz. Le vin est ajouté progressivement pendant la cuisson du riz, technique assez différente des plats mijotés.

Mon choix : Valpolicella (fruité et léger).

Poires au vin rouge

Utilisez un vin fruité et pas trop tannique : Beaujolais, Côtes du Rhône jeune. 75 cl de vin + sucre + épices pour 6 poires. Cuisson 30-40 minutes. Les poires absorbent la couleur et les arômes du vin.

Mon choix : Beaujolais Villages (arômes de fruits rouges parfaits).

Mes recommandations finales

Pour résumer simplement selon votre situation et votre budget.

Budget serré (5-6 €)

Côtes du Rhône, Languedoc, ou Chianti basique. Ces vins font le job pour 90 % des recettes. C’est mon choix par défaut quand je cuisine en semaine.

Budget moyen (8-10 €)

Côtes du Rhône Villages, Corbières, Minervois, Bourgogne rouge générique. Vous gagnez en qualité aromatique. Pour un dîner entre amis ou un dimanche, ça vaut le coup.

Budget confortable (12-15 €)

Crozes-Hermitage, Côtes de Nuits-Villages, bon Chianti Classico. Pour les grandes occasions ou quand vous voulez vraiment soigner un plat.

Ma règle personnelle : j’achète des bouteilles à 7-8 € en promotion (souvent 5-6 € finalement). Je cuisine avec, et si le vin est bon, je sers le reste à table ou j’en rachète pour boire.

Ne vous prenez pas trop la tête. Un vin honnête, que vous boiriez sans faire la grimace, fera un excellent plat cuisiné. L’essentiel est la qualité de vos produits de base (viande, légumes, bouillon) et votre technique de cuisson. Le vin est important, mais c’est juste un ingrédient parmi d’autres.

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